Qu'est-ce que c'est que cette histoire de lire entre les lignes ?
Ma foi, c'est fort simple en fait. (Allitération en "f").
J'ai remarqué, avec le temps, que mes étudiants, qui semblent me comprendre sans aucun problème à l'oral, ne comprennent pas les consignes les plus simples à l'écrit.
Par exemple, résumer le premier paragraphe de tel texte, etc...
C'est assez intrigant car je n'avais jamais vraiment été confronté à ce problème. En d'autres termes, ces étudiants parlent très bien (niveau B2) mais ne comprennent pas à l'écrit la moitié de ce qu'ils pourraient comprend à l'oral.
Donc à présent je me concentre là-dessus et consacre une partie de mon cours à l'acquisition de différentes stratégies de compréhension de l'écrit.
Car pour moi il semblerait que les manques sont ici. Non pas que les étudiants ne savent pas lire, encore moins qu'ils n'aient pas de vocabulaire, mais en fait ils ne possèdent pas cette culture de la consigne, cette prospérité de l'abstraction en mot, ces champs riants et verdoyants de la mise en forme académique des pensées en mots.
J'ai pu bien vérifier à l'oral, lors de débats, leur vivacité d'esprit et la pertinence de leurs argumentations.
Mais à l'écrit c'est comme si on rentrait en territoire inconnu; quelle est cette fleur du terroir, est-ce qu'elle va pousser ici où faut-il que je la plante là ?
Voilà un dilemme pour un professeur de langue. Apprendre une langue passe (ou passerait) aussi par des mécanismes indépendants de cette langue et propres à certaines cultures. Je rappelle que je suis dans une partie de l'Afrique où les traditions orales sont fortes et où l'éducation scolaire est souvent déficiente. Donc ces étudiants qui parlent bien français sont mis à mal dans les épreuves du DELF qui demandent, en dehors du niveau de français correspondant, une réflexion scolaire occidentale ou française.
Certains des étudiants arrivent très bien à comprendre les consignes de l'épreuve, pour d'autres cela est très difficile, même incompréhensible (alors que tout les mots de la consigne sont compris).
Le monde de la littéracie est un monde à part entière.
Peu à peu je suis en train d'en explorer les frontières, regardant tant du côté de ceux qui y entrent en toute légalité que de celui des clandestins.
A présent je vous laisse et vous souhaite une bonne journée.
A bientôt
Thibaud
encore une jolie découverte ! mais est on bien certain que nos enfants comprennent plus les consignes des exercices proposés ? Oui nous croyons que la culture écrite est une valeur universelle mais il y a tant de cultures orales, même chez nous. Les Gitans par exemple sont à l'aise à l'oral mais ne se sentent pas à l'aise dans la culture de l'écrit. Et nous, nous sommes venus au monde de l'école alors que nous étions totalement immergés dans l'oral et cette école nous a fait bien souffrir pour nous ouvrir, un peu pour la plupart, au mode et monde écrit. Bon courage
RépondreSupprimersalut Thibaut, j'ai lu attentivement ton articles car, au bout d'un moment, j'ai eu l'impression comme si tu parlais de mes stagiaires! le contexte est pas forcément le même (je donne des cours d'alphabétisation aux adultes immigrés installés en france) mais la nuance se ressemble: je fus un peu persuadée en écoutant mes stagiaires de poste aplha lire "parfaitement" un petit passage, mais aussi très étonnée en découvrant qu'ils ont rien pigé!! c'est un réel problème car, à mon avis, il est peu utile de savoir lire couramment une langue sans comprendre ce qu'on lit! Bon je te laisse réfléchir à ce problème et je te souhaite une bonne continuation
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